Poems

Pour rassembler les continents

Le poème est un cheval fou. Il abat les cloisons, franchit l’horizon dépaysé, contraint le chemin à être dans les yeux ébahis du promeneur. Je marche, je marche dans mon regard d’où naissent et renaissent les matins.
 
Poésie de l’évidence pour simplement dire les mots dans lesquels dorment les rêves, des mots vagabonds, des mots soleil, pain, étoile, oiseau, jardin. Le pari: être de plain-pied dans la tendresse du monde.
 
Aussi l’exil : lieu de passage et d’éternité, comme on ouvre une fenêtre sur l’océan pour voir le ciel, parcourir le monde, inventer les printemps ordinaires, être toujours debout, les pieds dans les songes, pour marcher, car la route lave la mémoire.
 
Revenir au pays natal, au pays rêvé où j’ai rendez- vous avec mes ombres dans les rues ensoleillées, puis repartir avec provision de fantômes, dans la confusion de tout sentiment géographique, ni sens ni certitude, ni ici ni ailleurs. Je me mets à ruminer mille vies comme la mienne, mille destins, mille amours, autant de poèmes et de chansons pour garder à vie le cœur et la lumière de l’enfance.
 
Je marche. Je marche. Le poème est un cheval fou, se rappeler, la barque est la route. L’horizon est dans le regard du promeneur.
 
Découvrir une chose douce et amère : des îles, il faut se résigner à foutre la mer dehors afin de pouvoir marcher librement pour célébrer la terre, dans le récitatif qui offre aux mots et aux choses le contrepoint du chant : éloge et mystère. Surtout l’élégance.
 
L’élégance sauve le poème comme le soleil l’été.